Depuis janvier dernier, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) entend accélérer le changement de modèle de production et de consommation afin de limiter les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat.
« D’habitude, les mois durant lesquels nous avons le plus d’activité, ce sont plutôt mars, avril et juin, lorsque les gens s’occupent un peu plus de leur jardin. Mais avec cette loi publiée en janvier dernier, les gens sont un peu perdus, car les collectivités doivent proposer des solutions à leurs administrés, mais ce n’est pas encore le cas partout. Les gens prennent donc directement contact avec nous pour acheter nos produits. Ça commence à redescendre progressivement au fil du temps », commente Julien Pungier, président de la Ferme du Moutta depuis 2018.
L’évolution des préoccupations sociétales pour la réutilisation des déchets et cette nouvelle réglementation font en effet les beaux jours de la Ferme du Moutta, qui a multiplié par dix son chiffre d’affaires en six ans !
Créée en 2007, cette entreprise s'inscrit dans une démarche résolument écologique, en promouvant le compostage et l'utilisation des vers de terre comme solution naturelle et durable pour le traitement des déchets organiques. Ces vers, véritables héros de l'environnement, permettent de transformer les déchets organiques en un fertilisant naturel riche en nutriments, appelé lombricompost. Ce fertilisant, précieux pour les plantes, favorise leur croissance et leur résistance aux maladies.
A la tête d’une agence de communication qu'il avait créée en 2003, Julien Pungier est devenu ami avec Paul Reveyron, le fondateur de la Ferme du Moutta, en s’occupant du site Internet et des réseaux sociaux. Le communicant s’est vu confier la vente de la société et l’a finalement rachetée avec sa femme.
« Un engrais dix fois plus puissant que le composte simple »
C’est à ce moment-là que l’activité de la Ferme du Moutta s’est développée, en profitant de politiques gouvernementales favorables. La petite entreprise de huit salariés vend aujourd’hui 10 modèles différents de lombricomposteurs (en fonction des besoins) et trois composteurs rotatifs. Elle collabore avec une cinquantaine de collectivités en France, des particuliers et même des pêcheurs locaux, venant pour se ravitailler en appât.
En grand passionné et autodidacte, Julien Pungier ne tarit pas déloge sur ce système de réutilisation des biodéchets, qui permet d’obtenir un engrais riche en nutriments et exempt d'agents chimiques, il stimule la croissance des plantes et améliore la structure du sol. « On n’y pense pas, car on ne le voit pas et il est aussi important que les abeilles ! Grâce à un système de plateaux, les vers de terre mangent les déchets alimentaires. C’est un engrais dix fois plus puissant que le composte simple pour engrais des plantes super efficace au lombricompostage », assure le gérant.
Pour pouvoir répondre à la demande, la Ferme du Moutta s’est installée dans un entrepôt de 1.400 m2 et réalise des travaux afin de créer un showroom, de nouveaux bureaux et rapatrier à terme ses vers de terre à Lons pour débuter l’élevage hors-sol. Présente sur YouTube et TikTok, l’entreprise va également reconstituer une ferme dans son studio pour faire des vidéos, des conférences et des formations plus qualitatives.
Le secret du succès de ce leader français repose sur un principe simple : proposer une gamme complète, adaptée aux besoins de sa clientèle et à des prix attractifs (70 à 300 euros l’unité selon les modèles). « Les pays du nord de l’Europe sont plus en avance sur le tri des déchets et notamment le compostage. Plus on descend, plus les anciennes habitudes sont tenaces », constate Julien Pungier.
En constante évolution
Soucieuse de répondre aux besoins croissants des jardiniers amateurs et professionnels, la Ferme du Moutta ne cesse d'innover. Elle a notamment développé le Wormbox®, un lombricomposteur individuel breveté, conçu pour faciliter le compostage des déchets organiques en milieu domestique. Ce produit innovant a connu un franc succès, contribuant à démocratiser la pratique du lombricompostage et à sensibiliser le public aux enjeux du développement durable.
La Ferme du Moutta mise également beaucoup sur le développement de nouveaux produits : des composteurs, de l’élevage de vers de farine ou de hannetons, dont les pêcheurs sont très demandeurs…
Depuis 2022, elle est la toute première et la seule entreprise en France à proposer à ses clients une solution de compostage avec des microbactéries et six modèles différents. « Le Bokashi est une méthode de compostage ancestrale japonaise. Ça fonctionne un peu de la même manière que le lombricompostage, mais on remplace les vers de terre par des microbactéries, avec un système de seaux hermétiques. On collabore avec l’établissement spécialisé d’aide par le travail (ESAT) l’Ensoleillade de Lons pour l’élevage de ces bactéries. Cette année, nous en avons produit tonnes ! », révèle-t-il.
La petite entreprise tente aujourd’hui de s’attaquer au marché américain. Si les débuts sont quelque peu timides, Julien Pungier ne doute pas que ses produits y ont de l’avenir. En ligne de mire : le Canada, les États-Unis et le Mexique.
Noémie Besnard
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