Si les artisans vinaigriers se comptent en France sur les doigts des deux mains, elle est la seule à suivre ce processus de A à Z, avec tout l’amour que cela implique et une surveillance rigoureuse. Car là où la plupart travaillent avec des lots de vins achetés avant de les transformer, vigneronne et vinaigrière ici ne font qu’une.
Sur 6 hectares des 18 au total de vignes de son Domaine de l’Airial, Petit et Gros Manseng poussent en agriculture raisonnée aux côtés de quelques pieds de Pinot Noir, pour produire à l’arrivée près de quatre mille bouteilles par an, qui partiront vers la France et jusqu’en Angleterre, en Suède, en Finlande, en Norvège ou encore en Irlande.
« Je me définis comme produisant du vinaigre de vigneron, tant mon quotidien est semblable à celui d’un vigneron ; il faut gérer les aléas climatiques et les maladies de la vigne en attendant la récolte. C’est ensuite que va débuter l’élaboration des vinaigres et des balsamiques » explique Cécile.
Mais entre le moment des vendanges et celui de l’expédition, sept ans vont devoir s’écouler pour laisser le vin se transformer, lentement mais sûrement, en vinaigre ou balsamique millésimés.
« Pour les vinaigres de vin, il faut compter près de six mois de fermentation alcoolique avant qu’ils rejoignent le chai pour y rester six à huit mois de plus, car c’est là que des bactéries naturellement présentes dans l’air vont venir faire leur travail et transformer l’alcool en acide ascétique, autrement dit en vinaigre. Après cette première année, l’élevage en chai pourra commencer dans des barriques en chêne. Le vinaigre y patientera pendant au moins cinq ans, selon mon cahier des charges personnel. Car, comme tout produit de la vigne, plus vous les élevez longtemps, plus vous développez des précurseurs aromatiques ; c'est comme pour les armagnacs... ».
Une patience immuable donc pour obtenir un vinaigre de vin millésimé, et une surveillance constante pour maintenir des conditions idéales tout au long de ces sept années, au cours desquelles Cécile prend autant de plaisir à élever ses vinaigres que ses chevaux, son autre grande passion.
Ses balsamiques, issus du moût de raisin des mêmes cépages, sont tout autant choyés tout au long du processus de transformation. Chauffés durant deux à trois jours à basse température juste après la récolte, ils séjourneront plus d’un an dans des barriques en chêne pour laisser fermentation alcoolique et acétique se faire en même temps. De petits fûts aux essences de bois différentes les accueilleront ensuite, pour les laisser tranquillement vieillir pendant quatre à six ans en y développant toute leur puissance aromatique.
« Ils sont parfaits pour magnifier viande, poisson, fromage, dessert, car ils affichent deux à quatre degrés à l’arrivée, contrairement aux balsamiques courant qui sont à six degrés. C’est un vrai bonheur pour les chefs cuisiniers créatifs ! »
En ce mois de mai dernier, son vinaigre de vin blanc doux Petit Manseng - « Pour moi le roi du cépage en Gascogne, que l’on fait en petit rendement et en vendanges tardives » - s’est hissé sur la première marche du podium au Championnat du monde à Cordoue au mois de mai dernier, face à une rude concurrence internationale où participaient Espagnols, Portugais, Italiens, Argentins, Colombiens, Equatoriens...
Une reconnaissance de la profession, qui vient couronner le travail remarquable d’une vigneronne vinaigrière exceptionnelle.
Marielle Fourcade
Voir le site du Domaine de l'Airial
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