On les dit « différents ». Mais au fond, qui fixe les règles du jeu ? Qui distribue les cartes d’un monde pensé pour ceux qui marchent droit, entendent bien, parlent vite, ou s’assoient sans assistance ? Le handicap, ce n’est pas toujours une question de fauteuil ou de canne blanche. C’est surtout le reflet d’une société où l’inclusion reste souvent théorique, et où l’acceptation de l’autre peine encore à faire le poids face aux regards trop étroits.
Pour des millions de personnes en France, être en situation de handicap, c’est chaque jour devoir négocier avec un environnement peu accommodant : escaliers trop raides, démarches administratives trop lourdes, accès à l’emploi trop fermé, vie affective trop jugée. C’est être prié d’entrer dans le moule, alors que c’est le moule lui-même qu’il faudrait adapter.
Mais derrière les discours et les bonnes intentions, la réalité, elle, résiste. Trop souvent encore, la différence isole. Elle met à l’écart, invisibilise, infantilise. Elle fait peur parfois, dérange souvent. Parce qu’elle bouscule, parce qu’elle oblige à repenser nos normes, nos habitudes, notre prétendue « normalité ».
Heureusement, des voix s’élèvent. Des mains se tendent. Des collectifs se forment. Et parfois, une fête naît. Une fête pas comme les autres. Une fête qui dit haut et fort : ici, toutes les places sont bonnes à prendre. Une fête où chacun vient comme il est, et repart un peu plus riche de ce qu’il n’est pas. À Mauléon-Licharre, cette fête a un nom : Soule et Moi de Possibles.
Un festival pour sortir des cases
Organisé par l’association du même nom, le festival « Soule et Moi de Possibles » revient pour une troisième édition les 25 et 26 avril 2025, avec toujours la même ambition : faire tomber les murs, en ériger d’autres, faits de ponts, de sourires et d’expériences partagées.
Née du besoin de fédérer les acteurs du handicap et de la différence en Soule et sur les territoires voisins, l’association a pour vocation de décloisonner les mondes. Celui du médico-social, celui des familles, celui des collectivités, celui du grand public. Et de les réunir, non pas autour d’un constat, mais autour d’un projet commun : vivre ensemble la différence.
Plus de quarante partenaires et une armée de bénévoles se retroussent les manches pour faire de ce rendez-vous un temps fort de l’inclusion, sans discours formatés ni tabous imposés. Ici, pas de scène pour les uns et de gradins pour les autres. Tout le monde est sur le terrain. Chacun participe à sa manière. Chacun a sa place. Et ça change tout.
C’est au Jai Alai de Mauléon, haut lieu de pelote mais surtout de vie collective, que se déroulera cette nouvelle édition. Deux journées rythmées par des temps de rencontres, d’ateliers, de projections, de jeux et d’échanges. Deux journées pour briser les silences, interroger les évidences, découvrir autrement.
Le vendredi 25 avril, c’est le cinéma Maule Baitha qui donne le la, avec une soirée conviviale où la gourmandise côtoiera la réflexion. Un repas sur le pouce, façon hot-dog solidaire, viendra ouvrir l’appétit des festivaliers. Puis, place à la projection du film “Mon inséparable” d’Anne Sophie Bailly. Une œuvre sensible, qui aborde sans détour la question de la vie affective et sexuelle des personnes en situation de handicap. Un sujet souvent passé sous silence, et qui mérite, plus que jamais, d’être mis en lumière. La séance se poursuivra par un temps d’échange : parce que ce n’est pas seulement le film qui doit faire parler.
Une journée pour les cinq sens… et plus encore
Le samedi 26 avril, place à la grande journée d’animations au Jai Alai. Dès 10 heures, les portes s’ouvriront sur un véritable parcours de la diversité, pensé pour les petits comme pour les grands, les curieux comme les habitués, les sportifs comme les artistes.
Découverte des sens, atelier braille, peinture sur toile, déguisements, parcours fauteuil, rugby adapté, massages, boxe, tir à l’arc, expression corporelle, Qi Kong ou jeux en bois : les propositions ne manquent pas. On y vient pour goûter, tester, ressentir. Pour se mettre à la place. Pour faire un pas – ou un mime – vers l’autre.
Parmi les temps forts : la diffusion à deux reprises du court-métrage “Moche” de Sophie Aren, dont le regard poétique et percutant interroge notre rapport à l’apparence et à la différence. Ou encore la présence d’Anne-Laure, zoothérapeute, venue avec son exposition vivante et sensorielle, où l’animal devient médiateur d’émotion.
Ce festival n’est pas une bulle hors du monde. Il s’inscrit dans une réflexion politique et sociale plus large, portée par l’association « Soule et Moi de Possibles ». Car pour que l’inclusion soit autre chose qu’un slogan, encore faut-il que les acteurs du territoire se parlent, se connaissent, se rassemblent. C’est là toute l’ambition de l’association : mettre en réseau, en projet, en mouvement.
À travers ses actions, elle entend aussi interpeller les décideurs : écoles, élus, structures d’accueil, entreprises. Pour que l’accessibilité, la représentation et l’écoute deviennent des réflexes et non des exceptions. Pour que la Soule, petite par sa taille mais grande par son énergie, montre l’exemple d’un territoire qui ne laisse personne sur le bord du chemin.
COUP DE POUCE
Et si, cette année, vous donniez un petit coup de main à la grande cause de l’inclusion ? Le Festival Soule et Moi de Possibles, c’est plus qu’un simple rendez-vous festif : c’est un moment pour se rencontrer, se comprendre, changer de regard… et peut-être aussi se transformer un peu.
Soule et Moi de Possibles, c’est un espace de joie autant qu’un espace de revendication. Un lieu où l’on vient pour se détendre, mais aussi pour apprendre. Un moment de respiration où les différences ne s’annulent pas, mais s’enrichissent les unes les autres.
C’est un festival où l’on rit en langue des signes, où l’on danse en fauteuil, où l’on peint avec les pieds, où l’on écoute autrement. Un festival qui ne cherche pas à normaliser, mais à valoriser. Un festival où l’on cesse de regarder la différence comme une barrière, pour la voir comme un horizon possible.
En venant, vous ne soutenez pas seulement un événement : vous encouragez des valeurs d’humanité, d’ouverture et de solidarité.
Alors, si vous avez deux heures devant vous ou toute la journée, poussez les portes du Jai Alai de Mauléon les 25 et 26 avril. Votre présence, votre curiosité, votre sourire peuvent faire toute la différence. Parce que chaque geste compte, et que l’inclusion, ça commence par un pas... vers l’autre.
Sébastien Soumagnas
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